La Fondation Un Cœur a mené une mission au Cambodge en collaboration avec l’association vétérinaire Yaboumba du 27 au 31 janvier 2014. Vous pouvez lire le rapport de cette mission en suivant ce lien…
Le cœur de toutes les espèces animales présente une activité électrique liée aux variations de potentiel de cellules spécialisées dans la contraction (myocytes) et des cellules spécialisées dans l’automatisme et la conduction des influx nerveux. L’électrocardiogramme est une représentation graphique de cette activité électrique. De fait, l’électrocardiographie (ECG) apparaît comme un outil approprié pour étudier et déceler des altérations électrophysiologiques du cœur, permettant ainsi de diagnostiquer nombre de maladies. La position des électrodes par rapport au cœur détermine l’aspect des déflexions sur l’enregistrement.
Des pathologies cardiaques ont été décrites chez les éléphants, cependant il n’existe que peu d’études faisant mention de l’ECG chez ces animaux. De plus, ces études n’impliquent que des éléphants anesthésiés et en captivité.
Au cours de notre mission, nous nous sommes intéressés à des éléphants dans une réserve naturelle gérée par le projet ELEPHANT VALLEY. Aucune équipe n’avait travaillé sur le sujet avec des animaux en liberté et surtout non anesthésiés. En soi, notre étude représentait une originalité certaine.
Ensuite, nous nous sommes penchés sur la méthode en elle même. Les rares ECG effectués mentionnait des pinces électrodes spéciales, lourdes et incommodes à utiliser. Nous avons opté pour de simples pinces électrodes, les mêmes que nous utilisons sur les chiens et chats. Mais il fallait trouver le bon emplacement et la bonne technique !
Nos objectifs étaient donc, d’une part, d’évaluer la faisabilité d’une méthode simple pour l’enregistrement électrocardiographie sur des éléphants d’Asie en liberté et non sédatés, et d’autre part, de décrire les modèles et les valeurs de l’ECG correspondant.
Sur les éléphants étudiés, notre technique a fonctionné à merveille. Nous avons ainsi pu obtenir près de 10 tracés ECG, propres, de bonne qualité et très exploitables.
Sur le tracé ECG lui même, nous avons noté de grandes différences avec celui obtenu chez le chien et le chat, en raison de deux ondes supplémentaires : l’onde U et l’onde Ta. L’onde « Ta » ou « onde T atriale » correspond à la repolarisation (la relaxation) des oreillettes. De trop faible amplitude chez la plupart des espèces animales, elles sont le plus souvent cachées par l’onde qui la suit, le « complexe QRS ». Au meilleur de notre connaissance, les ondes Ta n’avaient jamais été signalées chez les éléphants auparavant. Cette étude vient d’être publiée dans le Journal of Zoo and Wildlife Medicine, journal scientifique de référence pour tous les vétérinaires de zoos et de faune sauvage dans le monde.
Référence de l’article :
Chai N, Pouchelon JL, Bouvard J, Sillero LC, Huynh M, Segalini V, Point L, Croce V, Rigaux G, Highwood J, Chetboul V. Proposed Simple Method For Electrocardiogram Recording In Free-Ranging Asian Elephants (Elephas maximus).J Zoo Wildl Med. 2016 Mar;47(1):6-11
Légende des figures :
Figure 1 : Disposition des électrodes.
Figure 2 : Examen électrocardiographique par le Pr. Jean Louis Pouchelon
Figure 3 : L’ECG d’un éléphant avec les ondes Ta indiquées par des flèches. L’onde P correspond à la dépolarisation (et la contraction) des oreillettes, droite et gauche. L’onde RS (appelé aussi complexe QRS) correspond à la dépolarisation (et la contraction) des ventricules, droit et gauche. L’onde T correspond à l’essentiel de la repolarisation (la relaxation) des ventricules. L’origine de l’onde U reste discutée.